Une approche intégrée rend le COVID long plus visible et plus traitable
Le COVID long demeure une affection complexe et souvent invisible. Des mois, voire des années après une infection par le SARS-CoV-2, les patients continuent de présenter des symptômes tels qu’une fatigue extrême, une intolérance à l’effort, une dyspnée, des troubles de la concentration et un état général d’épuisement. Ces manifestations n’étant pas toujours objectivables par les examens médicaux classiques, les patients se voient fréquemment rassurés par un « tout est normal », alors même que leur vie quotidienne reste profondément altérée. Cette invisibilité contribue à faire du COVID long une pathologie insuffisamment reconnue, qui nécessite de toute urgence une meilleure reconnaissance et une prise en charge améliorée, notamment dans le contexte d’initiatives de sensibilisation telles que De Warmste Week.
En Belgique, la professeure docteure Elisabeth De Waele, responsable du service de Nutrition Clinique et de Diététique à l’UZ Bruxelles et professeure à la Vrije Universiteit Brussel (VUB), ainsi que Mme Berenice Jimenez Garcia (VUB/UZ Bruxelles), jouent un rôle de premier plan dans ce domaine. Elles conjuguent leurs expertises en nutrition, métabolisme et rééducation au sein du projet UNLOCK (Nutrition and LOComotoric Rehabilitation in Long COVID), une étude pilote visant à évaluer dans quelle mesure une approche personnalisée de la nutrition et de l’activité physique peut soutenir le processus de rétablissement.
Le déficit énergétique comme moteur de la fatigue
Les résultats de l’étude montrent qu’un grand nombre de patients atteints de COVID long présentent des apports énergétiques et nutritionnels insuffisants, compromettant davantage leur récupération. Mme Jimenez Garcia souligne que cette problématique ne doit en aucun cas être sous-estimée. Une proportion significative des participants à l’étude pilote ne couvrait pas ses besoins énergétiques de base et présentait des comportements alimentaires perturbés, susceptibles de contribuer à la fatigue sévère limitant leur fonctionnement quotidien.
Grâce à des évaluations systématiques de la composition corporelle, du métabolisme de repos et des apports alimentaires, les chercheurs ont pu élaborer des plans nutritionnels précis et individualisés. Les consultations hebdomadaires ont permis aux patients d’évoluer progressivement vers un schéma alimentaire personnel optimal, améliorant tant la quantité que la qualité de leur alimentation.
L’activité physique : progresser avec prudence, sans rechute
En parallèle de l’accompagnement nutritionnel, les patients ont bénéficié d’un programme de rééducation personnalisé. Étant donné que l’effort physique peut fréquemment entraîner une exacerbation des symptômes chez les patients atteints de COVID long, l’accent a été mis sur une reprise progressive de l’activité, assortie de stratégies de préservation de l’énergie. L’objectif était de permettre aux patients de tendre vers un mode de vie plus actif sans aggraver leurs symptômes. Ce programme adapté a été développé par le professeur David Beckwée (VUB) et le docteur Stijn Roggeman.
Au début du parcours, la condition physique du groupe étudié se révélait nettement inférieure à celle de la population générale. Le test assis-debout d’une minute, ainsi que d’autres épreuves fonctionnelles, ont confirmé une réduction marquée de la force musculaire et de la capacité à l’effort.
Des résultats encourageants
Après douze semaines, tant le groupe de référence que le groupe d’intervention ont présenté une amélioration, l’écart entre les deux groupes continuant à s’accentuer après la fin de l’intervention. Cette évolution est principalement attribuable à des progrès plus importants au sein du groupe d’intervention. Pour la professeure De Waele, ces résultats sont significatifs :
« Le programme de traitement personnalisé s’est révélé faisable dans la population atteinte de COVID long. En tant qu’étude pilote, UNLOCK ne permet pas de conclure à une guérison effective, mais les résultats sont prometteurs et renforcent la nécessité de poursuivre les recherches sur une approche multidisciplinaire du COVID long, assortie d’un suivi à plus long terme. »
La professeure De Waele souligne également que des ajustements relativement modestes peuvent déjà produire des effets perceptibles :
« Il n’existe à ce jour aucun traitement médicamenteux curatif du COVID long. En revanche, veiller à ce que les patients couvrent leurs besoins nutritionnels de base relève de notre expertise et peut être mis en œuvre rapidement. Cela pourrait déjà contribuer à atténuer cette fatigue accablante. Nous n’en sommes pas encore au terme, et cette approche ne constituera sans doute pas une solution universelle, mais les connaissances nouvellement acquises sont essentielles. »
Une affection invisible appelle des soins visibles
Le projet UNLOCK démontre non seulement la faisabilité d’une prise en charge intégrée, mais également son caractère indispensable. La combinaison d’un accompagnement nutritionnel et d’une rééducation fonctionnelle permet de rendre plus perceptible, tant pour les soignants que pour les patients eux-mêmes, la dysrégulation physiologique sous-jacente jusque-là largement invisible.
Par leurs travaux, Mme Jimenez Garcia et la professeure De Waele franchissent une étape importante vers une meilleure reconnaissance du COVID long. Leurs résultats montrent que le rétablissement repose sur une prise en charge individualisée, un accompagnement multidisciplinaire et une attention soutenue portée à la situation singulière de chaque patient. Le COVID long ne saurait être considéré comme une simple séquelle post-virale, mais bien comme une dysrégulation prolongée nécessitant une attention continue, des recherches approfondies et des soins spécialisés.
Info
Prof. Elisabeth De Waele : secretariaat.klinischenutritie@uzbrussel.be | Tél. +32 2 476 33 44
Mme Berenice Jimenez Garcia (VUB/UZ Bruxelles) : berenice.jimenezgarcia@uzbrussel.be | Tél. +32 2 474 96 24