Doctorat à la VUB : les ancêtres microbiens lointains de l’Homme adoraient les conditions extrêmes et nous en apprennent davantage sur les premières formes de vie sur Terre

Doctorat à la VUB : les ancêtres microbiens lointains de l’Homme adoraient les conditions extrêmes et nous en apprennent davantage sur les premières formes de vie sur Terre

Les archées, un groupe de microbes primitifs, sont particulièrement connus pour vivre dans des environnements extrêmes. Il y a quelques années, il a été démontré que ces microorganismes étaient étroitement apparentés à l’Homme du point de vue de l’évolution. Alors que nombre de bactéries, qui ne sont pas vraiment apparentées aux êtres humains, ne peuvent supporter que de faibles variations de température et d’acidité, les archées sont des maîtres de la survie. Une recherche de doctorat menée à la VUB a fait la lumière sur le mécanisme responsable de cette résistance. Comme tous les autres organismes, les archées produisent des protéines dites de choc thermique, qui, en cas d'un choc thermique extrême, veillent à ce que les autres protéines contenues dans les cellules soient correctement repliées dans la bonne conformation et non éventuellement déformées par la chaleur, permettant ainsi aux microörganismes de survivre au choc thermique. Les recherches effectuées ont permis de découvrir comment les archées « dirigent » les protéines de choc thermique et comment elles sont efficacement utilisées.

« Dans le cadre de mon doctorat, j’ai étudié comment ces microbes primitifs font face à un stress thermique », explique Rani Baes, chercheuse du groupe de recherche Microbiologie au sein du département des sciences du bioingénieur de la VUB. « Pour ce faire, je me suis appuyée sur l’organisme modèle thermophile des crénarchées : Sulfolobus acidocaldarius. Ce microörganisme a été découvert dans les années 1970 dans une source chaude. Il connaît une croissance optimale dans un environnement où la température est de 75 °C et acide avec un pH de 2-3, soit un pH comparable à celui du jus de citron sur le point de bouillir. J’ai étudié comment cet organisme réagissait face à un choc thermique rapide, comme une augmentation soudaine de la température de 10 degrés Celsius, car la cellule doit réagir immédiatement dans une telle situation pour éviter que les molécules cellulaires (comme l’ADN, l’ARN et les protéines) ne « fondent », et que, par conséquent, la cellule ne meure. »

Rani Baes a découvert que le principal mécanisme de défense de son organisme modèle comprenait l’action régulée des protéines de choc thermique, qui peuvent résister au choc thermique et replier les autres protéines au sein des cellules dans leur état fonctionnel initial. « J’ai simulé en laboratoire les variations de température qui surviennent naturellement dans les sources chaudes. Mes recherches ont montré que le mécanisme de défense de S. acidocaldarius se déclenche dès que la température augmente d’environ 10 °C. Lorsque la température augmente de 15 °C, les cellules meurent immédiatement. Il est donc essentiel de choisir une bonne température afin d’examiner comment les cellules peuvent se protéger. »

Afin d’étudier plus en profondeur la réaction à un choc thermique, Rani Baes a purifié et séquencé l’ARN et les protéines de la cellule. « En ce qui concerne l’ARN, nous avons constaté une réaction importante directement après le choc thermique », déclare Rani Baes. L’ARN constitue l’intermédiaire entre le code génétique contenu dans l’ADN et la protéine fonctionnelle. ​ « Dans les bactéries et les eucaryotes, le contrôle de la transformation de l’ADN en ARN en cas de choc thermique est coordonné étroitement par une protéine spécialisée. Nos résultats ont toutefois démontré qu’un autre processus était à l’œuvre pour S. acidocaldarius. Le microbe primitif utilise un mécanisme ancien et moins évolué afin de réguler le processus de transcription. En outre, il semble que les archées empruntent un raccourci dans le processus de production de la protéine. Par conséquent, des protéines de choc thermique peuvent être rapidement produites, ce qui augmente considérablement les chances de survie en cas de choc thermique. »

Comme S. acidocaldarius s’appuie sur différents mécanismes de régulation, l’organisme est bien adapté à l’habitat stressant dans lequel il vit. Selon Rani Baes, ces découvertes nous permettent de mieux comprendre comment les toutes premières formes de vie sur Terre pouvaient également faire face à leur environnement. « De nombreuses archées sont extrêmophiles, c’est-à-dire des organismes qui grandissent de manière optimale dans des environnements extrêmes », ajoute la chercheuse. « Ces environnements hostiles font penser à comment était la Terre lors de l’apparition des premières formes de vie. Aujourd’hui, on peut observer des paramètres environnementaux comparables dans des sources hydrothermales des fonds marins ou dans une zone volcanique sur terre, comme des geysers ou des sources chaudes. Il y a environ 3,5 milliards d’années, lors de l’apparition des premières formes de vie, ces types d’habitats étaient présents sur toute la surface de la Terre. »

Les archées constituent l’un des trois grands domaines du vivant et sont étroitement apparentées aux êtres humains. La branche du vivant qui a évolué vers les animaux, les plantes et les champignons (les « Eukaryota » ou eucaryotes, qui possèdent tous un noyau) découle de ce type de microbe primitif. En d’autres termes, les archées sont les ancêtres des eucaryotes.

« Malheureusement, peu de recherches sont menées sur les archées », regrette Rani Baes. « C’est étonnant, puisque dans la perspective de l’évolution, il est au contraire intéressant de découvrir comment ces microbes primitifs pouvaient faire face au stress thermique et comment ils percevaient ces variations de température. Cela peut nous permettre de comprendre comment la première forme de vie a pu apparaître sur Terre. »

Plus d' information:

Rani Baes: [email protected]

Regulation of heat shock response in the thermophilic Crenarchaeon Sulfolobus acidocaldarius.

 

 

 

WE
A propos de Press - Vrije Universiteit Brussel

Press - Vrije Universiteit Brussel
Pleinlaan 2
1050 Brussel