Allez-vous vivre une vie sans précédent ?
Une nouvelle étude publiée dans Nature révèle que les jeunes vulnérables d'aujourd'hui seront les plus touchés par l’augmentation continuelle des émissions de gaz à effet de serre.
Les recherches menées par des climatologues de la Vrije Universiteit Brussel (VUB) révèlent que des millions de jeunes d'aujourd'hui vivront une exposition sans précédent aux vagues de chaleur, aux mauvaises récoltes, aux inondations fluviales, aux sécheresses, aux incendies dans les forêts et les zones naturelles et aux cyclones tropicaux au cours de leur vie dans le cadre des politiques climatiques actuelles. Si les températures mondiales augmentent de 3,5 °C d'ici à 2100, 92 % des enfants nés en 2020 connaîtront une exposition sans précédent aux vagues de chaleur au cours de leur vie, ce qui concernera 111 millions d'enfants. Le respect de l'objectif de 1,5 °C de l'Accord de Paris pourrait protéger 49 millions d'enfants de ce risque. Si l'on prend en compte tous les enfants âgés de 5 à 18 ans aujourd'hui, on arrive à un total de 1,5 milliard d'enfants touchés dans le cadre d'un scénario à 3,5 °C, alors que 654 millions d'enfants peuvent être protégés en restant en dessous du seuil de 1,5 °C. L'étude souligne également que les enfants très vulnérables sur le plan socio-économique sont encore plus susceptibles d'être exposés à des extrêmes climatiques sans précédent au cours de leur vie. Il est urgent de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre pour préserver la vie des enfants du monde entier.
Le fardeau disproportionné du changement climatique sur les jeunes
Les extrêmes climatiques, notamment les vagues de chaleur, les mauvaises récoltes, les inondations fluviales, les cyclones tropicaux, les incendies dans les forêts et les zones naturelles et les sécheresses, s'intensifieront avec la poursuite du réchauffement de l'atmosphère. Les enfants d'aujourd'hui subiront plus d'extrêmes climatiques que n'importe quelle génération précédente.
"En 2021, nous avons démontré que les enfants seront confrontés à une augmentation disproportionnée de l'exposition aux événements extrêmes, en particulier dans les pays à faible revenu. Aujourd'hui, nous avons examiné les cas où l'exposition cumulée aux extrêmes climatiques tout au long de la vie d'une personne dépassera de loin celle qu'elle aurait subie dans un climat préindustriel", explique Wim Thiery, professeur de sciences du climat à la VUB et coordinateur de l'étude.
« Dans cette nouvelle étude, vivre une vie sans précédent signifie qu'en l'absence de changement climatique, on aurait moins d'une chance sur 10 000 de connaître autant d'extrêmes climatiques au cours de sa vie », explique Luke Grant, auteur principal et climatologue à la VUB et à Environment and Climate Change Canada (ECCC). "Il s'agit d'un seuil strict qui permet d'identifier les populations confrontées à des extrêmes climatiques bien plus importants que ceux auxquels on pourrait s'attendre en l'absence de changement climatique d'origine humaine. Le seuil varie en fonction du lieu et du type d'extrême climatique.
En combinant les données démographiques et les projections des modèles climatiques sur les extrêmes climatiques pour chaque endroit de la planète, les chercheurs ont calculé le pourcentage de chaque génération née entre 1960 et 2020 qui sera confrontée à une exposition sans précédent aux extrêmes climatiques au cours de sa vie (voir la figure 1).
L'impact du changement climatique sur les générations
Plus une personne est jeune, plus elle risque d'être exposée à des extrêmes climatiques sans précédent. Même si nous parvenons à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, 52 % des enfants nés en 2020 seront exposés à des vagues de chaleur sans précédent, contre seulement 16 % de ceux nés en 1960. En ce qui concerne les vagues de chaleur, l'effet est particulièrement prononcé pour les enfants nés après 1980, alors que les scénarios de changement climatique déterminent de plus en plus les niveaux d'exposition.
"En stabilisant notre climat à environ 1,5 °C au-dessus des températures préindustrielles, environ la moitié des jeunes d'aujourd'hui seront exposés à un nombre sans précédent de vagues de chaleur au cours de leur vie. Dans un scénario à 3,5 °C, plus de 90 % d'entre eux subiront une telle exposition tout au long de leur vie", prévient Grant. "Le même tableau se dessine pour les autres extrêmes climatiques examinés, bien que les fractions touchées de la population soient légèrement inférieures. Pourtant, on observe les mêmes différences générationnelles injustes dans l'exposition sans précédent". Les enfants des pays tropicaux seront les plus durement touchés dans le cadre d'un scénario à 1,5 °C. Cependant, dans les scénarios à fortes émissions, presque tous les enfants du monde entier risquent de vivre une vie sans précédent (voir figure 2).
Vulnérabilité climatique et injustice sociale
L'étude met également en évidence l'injustice sociale du changement climatique et de ses impacts. Dans le cadre des politiques climatiques actuelles, les enfants les plus vulnérables sur le plan socio-économique qui naîtront en 2020 subiront presque tous (95%) une exposition sans précédent aux vagues de chaleur au cours de leur vie, contre 78% pour le groupe le moins vulnérable. "Ce sont précisément les enfants les plus vulnérables qui subissent la pire escalade des extrêmes climatiques. Avec des ressources et des options d'adaptation limitées, ils sont confrontés à des risques disproportionnés", déclare Thiery.
L'urgence d'une action mondiale en faveur du climat
À l'approche de la COP30 au Brésil, les pays doivent présenter des engagements actualisés en matière de climat. Selon les politiques actuelles, le réchauffement de la planète atteindrait environ 2,7 °C au cours de ce siècle. Cette étude et le rapport associé de Save the Children soulignent l'urgence de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C pour les enfants d'aujourd'hui et de demain.
Inger Ashing, CEO de Save the Children International, a déclaré : "Dans le monde entier, les enfants sont contraints de supporter le poids d'une crise dont ils ne sont pas responsables. Une chaleur dangereuse qui met en péril leur santé et leur apprentissage ; des cyclones qui s'abattent sur leurs maisons et leurs écoles ; des sécheresses rampantes qui ratatinent les récoltes et réduisent le contenu de leurs assiettes. Au milieu de ces désastres quotidiens, les enfants nous supplient de ne pas nous déconnecter. Cette nouvelle étude montre qu'il y a encore de l'espoir, mais seulement si nous agissons de manière urgente et ambitieuse pour limiter rapidement le réchauffement des températures à 1,5 °C, et si nous plaçons réellement les enfants au centre de notre réponse au changement climatique.
« Alors que les émissions mondiales continuent d'augmenter et que la planète n'est plus qu'à 0,2 °C du seuil de 1,5 °C, les dirigeants mondiaux doivent agir pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et alléger le fardeau climatique qui pèse sur les jeunes d'aujourd'hui », conclut Thiery.
Chiffres en brèf
Les chiffres présentés dans la nouvelle étude publiée dans Nature portent sur une seule cohorte de naissance : les enfants nés en 2020. Les extrêmes climatiques affecteront toutes les générations, mais surtout les jeunes. C'est pourquoi ci-dessous sont présentés des chiffres qui tiennent compte de tous les enfants âgés de 5 à 18 ans aujourd'hui, ce qui représente une population totale de 1,69 milliard d'enfants.
Vagues de chaleur
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 855 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux vagues de chaleur au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 1353 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux vagues de chaleur au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 1509 million children aged 5-18 in 2025 face unprecedented lifetime exposure to vagues de chaleur au cours de leur vie.
Mauvaises récoltes
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 316 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux mauvaises récoltes au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 400 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux mauvaises récoltes au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 431 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux mauvaises récoltes au cours de leur vie.
Incendies dans les forêts et les zones naturelles
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 119 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux incendies dans les forêts et les zones naturelles au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 134 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux incendies dans les forêts et les zones naturelles au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 147 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux incendies dans les forêts et les zones naturelles au cours de leur vie.
Sécheresses
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 89 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux sécheresses au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 111 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux sécheresses au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 116 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux sécheresses au cours de leur vie.
Inondations fluviales
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 132 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux inondations fluviales au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 188 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux inondations fluviales au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 191 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux inondations fluviales au cours de leur vie.
Cyclones tropicaux
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 1.5 °C, 101 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux cyclones tropicaux au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 2.7 °C, 163 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent cyclones tropicaux au cours de leur vie.
Dans un scénario de changement climatique prévoyant un réchauffement de la planète de 3.5 °C, 163 millions d’enfants âgés de 5 à 18 ans en 2025 connaîtront une exposition sans précédent aux cyclones tropicaux au cours de leur vie.
Références:
Publicatie in Nature: https://www.nature.com/articles/s41586-025-08907-1
Save The Children Report: https://resourcecentre.savethechildren.net/document/born-into-the-climate-crisis-2-an-unprecedented-life-protecting-childrens-rights/
Contact
Prof. Dr. Wim Thiery:
wim.thiery@vub.be
https://bsky.app/profile/wimthiery.bsky.social
+32 2 629 30 29
Dr. Marie Cavitte:
marie.cavitte@vub.be
+32 470 19 24 15
L'étude a été réalisée par des chercheurs de la Vrije Universiteit Brussel (VUB), Environment and Climate Change Canada, KU Leuven, de l'Institut Royal Météorologique de Belgique (RMI), et de l’ETH Zurich.
